Longue division, Derek Nikitas - Road movie et écorchés vifs


On peut dire de Jodie qu'elle a raté sa vie. Un boulot de femme de ménage sous-payé, une piaule miteuse, un gamin qu'elle a dû abandonner très jeune. Alors la tentation est forte, lors d'une de ses journées interminables passées à récurer les maisons des riches, de dérober ces 5000 dollars qui traînent sur une table de nuit utilisée en guise de vide-poches. Mais voilà, c'est une belle connerie. Heureusement, comme souvent pour les paumés, aux Etats-Unis, il reste la route et / ou les grands espaces, alors elle avale des kilomètres, bien décidée à  retrouver son fils, et peut-être à lui offrir une autre vie, dans une cavale dont on ne sait pas bien si elle est une fuite ou une quête.

Des destins entrecroisés, où rien ni personne ne va bien dans cet hiver polaire et désolé, où les solitudes s'entrechoquent, où les êtres sont plus abîmés les uns que les autres, entre maladie, adolescence à vif et cris de détresse. Le style a quelque chose, explosif, presque à la hache, brut, et glauque au possible, sombre - très sombre, un peu dans la lignée désespérée d'un David Vann (sans en atteindre toute à fait le niveau littéraire). Pas étonnant que ça plaise à David Lynch.

Sans être aussi dithyrambique que l'est la quatrième de couverture, un certain talent, une voix originale, un auteur sans doute à suivre. Pour poursuivre dans la lignée des adolescents déglingués, on peut enchaîner sur l'assez bon Carmen, Nevada ou encore Un arrière-goût de rouille - ou, pour plus littéraire, Le Chardonneret.

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