13 heures, Deon Meyer

Rachel court. Elle court depuis des heures pour échapper à une bande de tueurs déterminés, omniscients et infatigables. A la même heure, la police découvre le corps d'une touriste américaine égorgée, son sac à dos dérobé. Quelques minutes plus tard, c'est Alexa Barnard, ex-star de la chanson afrikaner, qui se réveille d'une bonne cuite pour se retrouver nez à nez avec le cadavre de son mari assassiné. Bref, une journée comme une autre qui commence pour la police du Cap et son enquêteur-phare, Benny Griessel.

Mais Benny Griessel n'est plus tout jeune, et il a été placardisé, dans une fonction sans responsabilité où il encadre de jeunes officiers débutants."Le dégoût ça oui, il l'avait accompagné toute sa vie. Il était incapable d'expliquer pourquoi il ressentait sans cesse un tel dégoût envers toute chose, et, par-dessus tout, envers lui-même." Petit à petit, néanmoins, il parvient, expérience et intuition obligent, à dégager des relations entre les trois affaires.

L'excellent Deon Meyer construit ici un thriller au rythme endiablé, minuté, où les minutes et les évènements s'enchaînent de manière saccadée, avec un suspense bien huilé et maintenu sur 500 pages, qui baladent le lecteur à l'ombre de Table Mountain, sur les pas d'un Benny Griessel hagard, écrasé par sa promesse faite au père situé à l'autre bout de la planète d'une jeune fille en fuite, et entretenant des rapports troubles avec l'alcool alors qu'il est abstinent depuis six mois ; bref, plus attachant que jamais.

"C'est ça le problème avec ce pays, tout le monde se plaint, personne ne veut rien faire, personne ne veut oublier le passé."

Au-delà du bon polar, 13 heures s'affirme aussi comme un miroir que se tend à elle-même la nouvelle Afrique du Sud, et la police, en voie de réorganisation profondes, est le théâtre des rivalités, des conflits et des tensions qu'engendre la construction et la recomposition de la société, notamment au travers de la politique de discrimination positive ou de la montée en puissance de la bourgeoisie noire. Sans angélisme, c'est bourdonnant, lucide, brutal et passionnant.

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