L'armée illuminée, David Toscana


"C'est justement la mère d'Arechavaleta qui m'a appelé, interrompt le directeur, vous vous êtes enflammé un peu trop durant votre cours d'histoire, vous auriez dû vous limiter à donner des dates, des noms, des évènements, tout ce qui n'est pas dans le manuel scolaire est politique, et les enfants ne viennent pas à l'école faire de la politique. Madame Arechavaleta vous a accusé de faire de l'école un nid de communistes. Il n'était pas nécessaire de leur parler de cette guerre, ni de faire passer les Etats-Unis pour nos ennemis. Il suffisait de leur rapporter que Santa Anna leur avait vendu le territoire, il est plus sain de haïr un président mort que nos voisins du Nord".

Et voilà, c'est encore arrivé. Après avoir une nouvelle fois défendu une version très partiale et personnelle de la guerre du Mexique, Matus se retrouve à la porte de l'école ... mais il a su toucher quelques jeunes esprits enflammés par ses discours patriotiques et romanesques. Don Qichotte d'opérette et marathonien borné, il entraîne alors ses ouailles, une bande débraillée d'écoliers à peine capables de jouer aux dominos, dans un périlleuse reconquête du Nouveau-Mexique où le besoin de héros valeureux se fait impérieusement sentir, une aventure résolument décalée qui laissera des traces indélébiles.

"Nous sommes peu, dit Comodoro, mais la patrie préfère une poignée de vaillants à une cohue de poltrons. Gardez sur notre but le plus grand secret jusqu'à recevoir des ordres d'en haut. Azucena n'e peut plus, elle se dirige vers Comodoro et l'embrasse. On entend des applaudissements. L'institutrice de retour demande le silence".

Illuminée, cette armée, elle l'est ! Dans un récit aussi farfelu que drôlatique, Toscana entraîne son lecteur sur les pistes poussiéreuses du Nord du Mexique, au rythme haletant d'aventures picaresques sans cesse renouvelées, le jeune âge des protagonistes confrontés à une situation qui les dépasse fournissant un réservoir inépuisable de rebondissements.

"Comment gagne-t-on une guerre, Matus ? demande Azucena d'un air distrait, en crachant dans ses doigts pour nettoyer une tache sur la chaussure de Cerillo, il faut tuer tous les Gringos ?"

Le ton est divertissant ; les aventures rocambolesques comme on les aime ; les personnages touchants de maladresse, et si attachant (même le chef de meute totalement barré). Séduisant sur le principe, plutôt déjanté, mais fatigant et à la longue assez triste, L'armée illuminée laisse une impression mitigée et le sentiment de ne pas avoir suivi complètement David Toscana dans ses délires.

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