Enfant 44, Tom Rob Smith

Lecture insolite dans le cadre du défi  God save the livre.

Moscou, au début des années 1950. Leo est l'un des officiers du redouté MGB, la puissance police politique soviétique. Rouage du système, il applique les consignes sans se poser beaucoup de questions sur son rôle réel et ses implications.  

"Même si son propre travail au sein du MGB était souvent ingrat, il en comprenait la nécessité, celle de protéger la révolution contre ses ennemis, de l'intérieur comme de l'extérieur, contre ceux qui cherchaient à la saboter, à la faire échouer par tous les moyens. Pour la sauver, Leo était prêt à sacrifier sa vie. Et celle des autres." 

Alors qu'il tente d'étouffer une affaire criminelle, en maquillant un crime en accident, Leo met le pied dans un engrenage dangereux. Commençant sa propre enquête, il tombe en disgrâce, et doit affronter l'exil et la suspicion de ses dangereux supérieurs. Un parcours initiatique qui le décille progressivement de son aveugle obéissance. "Ne rien faire ne nous met pas à l'abri d'une arrestation. Je suis bien placé pour le savoir."

Le principal intérêt de ce polar de facture assez classique réside surtout dans la reconstitution de l'atmosphère de paranoïa délirante de l'URSS des dernières années staliniennes. Très documenté, Enfant 44 parvient à dresser, derrière l'intrigue policière à proprement parler (efficace sans être révolutionnaire) le portrait d'une société de la peur, où suspicion et méfiance sont les maîtres mots, jusqu'au sein des groupes d'amis, des familles ou des couples. Les personnages principaux, broyés par le système, sont attachants par leurs doutes, quoique pas toujours tout à fait assez approfondis.

Enfant 44 n'en demeure pas moins un polar correctement écrit, un thriller et une traque relativement efficaces. Pour le même genre de problème, mais dans une veine plus littéraire, on pourra utilement se tourner vers Une exécution ordinaire de Dugain.

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