Le blanc va aux sorcières, Helen Oyeyemi


Après L'Indésirable et Bellefleur, encore une histoire de maison hantée (décidément).

"-Sade, je veux te demander quelque chose. Si tu dis oui, je te croirai. Dis-moi seulement la vérité. Il y a un problème dans cette maison, n'est-ce pas ?"

Miranda et Eliot, deux jumeaux adolescents, viennent de perdre leur mère, Lily Silver. Ils vivent avec leur père, Luc, dans la grande maison familiale, une demeure inquiétante, pleine de recoins, de secrets et de spectres, qui s'arroge parfois le monopole de la narration, et pour tout dire ne se montre pas très bienveillante avec ses occupants. L'inquiétant 29 Barton Road exerce le même magnétisme malsain sur le lecteur que sur ses habitants, mais fait fuir les domestiques.

La cuisinière, Sade, a beau disposer ses grigris, ils ne suffisent pas à empêcher l'ascenseur de se bloquer en enfermant les petites filles, le mannequin de vivre sa vie propre, la cuisine de se remplir de pommes bicolores. Les occupants de la maison semblent sombrer lentement de la folie, et s'éloigner de la maison, comme le fait Miranda en rejoignant Cambridge, n'arrange rien. Ore, l'amie de la jeune fille, s'efforce pourtant de la sauver du naufrage.

Avec Le Blanc va aux sorcières, Helen Oyeyemi, jeune britannique d'origine nigériane (nous avons le même âge), secoue son lecteur ; ce n'est pas une lecture de tout repos. On frémit, on tremble, et puis on se ressaisit et on respire à nouveau, le temps d'un chapitre ou deux, avant de replonger dans l'angoisse mystérieuse, poétique que son écriture et ses images distillent. L'écriture, brutale et sensuelle, évoque quelque chose de la Silvia Avallone de D'Acier. Les métaphores sont d'une justesse rare (beaux passages sur le désir, la raison vacillante, la gémellité), la construction bien fichue, le style vibre et résonne.

Résolument perturbant et dérangeant (surtout quand tout le monde dort dans votre maison), et évidemment il faut accrocher avec le genre, mais une chose est sûre, ça dépote, et il y a du talent chez cette fille-là. Et c'est une nouvelle contribution pour mes résolutions 2012.

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